146-2 Les Roches-Noires

A la sortie de la taverne…

Max : « Merci bonome. C’était bien le musée et c’était bien les dinosaures 🙂 »

Samuel : « Cousin Max a vu des dinosaures 🙂 Il va rholalaer toute la soirée 🙂 »

Max : « Parce que ça vous a pas plu peut-être ? »

Léo : « Ben si. »

Samuel : « C’est pas tous les jours qu’on voit des dinosaures. »

Léo : « Et tout ça de fossiles… »

Max : « On va aux Roches-Noires maintenant ? »

Le chevalier : « Oui Maxou. »

Max : « Tu as dit que tu connaissais pas. Tu connais pas du tout ? »

Le chevalier : « Je n’y suis jamais allé et je n’ai rien lu. Mais il me semble que nous allons observer l’Oxfordien. »

Max : « C’est encore le Jurassique. »

Léo : « En Normandie on aura vu : le Bajocien, le Bathonien, le Callovien et l’Oxfordien. »

Max : « Bonome, il y a longtemps, tu avais fait un tableau pour me présenter les étages et les systèmes. Tu te souviens ? »

Le chevalier : « Oui. »

Max : « Tu pourrais en refaire un pour le Jurassique. S’il te plaît ? »

Le chevalier : « Si tu veux. Mais plus tard. »

Max : « D’accord. Merci bonomou. Comme ça on verra mieux ce qu’on connaît. »

Le chevalier : « Nous arrivons. »

Max : « Mais… On voit pas la mer ! On va devoir tout marcher ? »

Le chevalier : « Vous allez pocher. Je dois laisser notre monture ici et marcher quelques centaines de mètres avant d’accéder à l’estran. »

Max : « D’accord. Nous, on suit 🙂 »

Léo : « Rholala ! C’est quoi cet escalier ? Et il continue encore ! »

Samuel : « Fais attention chevalier. Prends ton temps. »

Max : « Bonome ! Pourquoi tu escalades la barrière ? BONOME ?! NON MAIS IL EST PAS POSSIBLE CE BONOME ! TU PEUX PAS PRENDRE L’ESCALIER COMME TOUT LE MONDE ? »

Léo : « Mauvais argument : il est pas comme tout le monde. Tout le monde sait ça… »

Max : « Ça c’est sûr ! Les gens NORMAUX escaladent pas la barrière pour descendre par les rochers tout cassés ! Pfff ! Je vais te dénoncer à Princesse et elle va te gronder ! »

Le chevalier : « Max, ce n’était pas si acrobatique que cela. Et ça prouve que mon cerveau se remet de ma chute. »

Max : « Je suis pas certain que ce soit une bonne nouvelle… »

Léo : « Effectivement… »

Samuel : « Chevalier, tu es pas raisonnable. »

Le chevalier : « Oui oui… Bien commençons l’inspection. »

Léo : « C’est tout cassé ici ! »

Léo : « Ça va pas être facile… »

Samuel : « C’est quoi la couche noire ? »

Le chevalier : « Du silex. Nous en reverrons sûrement plus loin… »

Max : « Comment tu peux savoir ? Tu es jamais venu ! »

Le chevalier : « Max, je te rappelle que les couches penchent légèrement vers le nord-est, ce qui fait qu’en nous déplaçant le long des falaises, nous découvrons des couches de plus en plus récentes. »

Léo : « Et nous pouvons reconstituer la coupe géologique… »

Samuel : « Nous, on a pas de bateau qui navigue dans le temps comme Tante Yvonne mais on voyage quand même dans le temps. On est au Jurassique nous aussi 🙂 »

Léo : « Tu as raison petit Sam. »

Max : « On a peut-être pas de bateau mais on a un bonome qui voyage dans le temps 🙂 »

Samuel : « C’est tout effondré ici… »

Max : « Ça te plaît toujours les effondrements Philoléo ? »

Léo : « Oui. Je sais pas pourquoi… C’est une image du temps qui passe. Rien est immuable… »

Samuel : « J’aime bien aussi mais ça facilite pas l’observation… »

Max : « Superbonome, pourrais-tu nous présenter ces falaises s’il te plaît ? »

Le chevalier : Oui, mais revenons un peu sur nos pas… Voilà… »

Max : « Oui… Nous t’écoutons… »

Le chevalier : « Nous sommes à l’Oxfordien… »

Léo : « Aux Vaches-Noires c’est aussi l’Oxfordien mais c’est pas pareil. Comment tu expliques ça ? »

Le chevalier : « Parce que c’est la suite des Vaches-Noires. Souvenez-vous : nous avons vu l’Oxfordien inférieur constitué de marnes. Au-dessus il y avait… »

Léo : « Le calcaire oolithique de Trouville puis le Coral-Rag ! »

Le chevalier : « Très bien mon petitours ! »

Max : « Pfff ! Nous aussi on le savait ! »

Léo : « Alors il fallait le dire ! »

Max : « Et priver bonome de la possibilité de se croire cultivé ? Léo, voyons ! »

Léo : « Tu savais même pas ! »

Max : « Si, mais je suis pas égoïste moi. Je laisse bonome s’exprimer. »

Samuel (au chevalier) : « Ils recommencent… Ils sont terribles mes cousins. Tu es très patient avec eux chevalier. Je t’admire. »

Le chevalier : « Oh, tu sais, ce n’est pas si terrible que ça. »

Max : « Dites, vous allez parler de nous longtemps comme ça ? »

Léo : « Parce qu’on est là vous savez ! »

Max : « On vous entend ! »

Samuel : « Vous avez fini ? On peut reprendre ? »

Max : « Oui, j’étais en train de dire qu’aux Vaches-Noires nous avons pu observer l’Oxfordien moyen carbonaté avec le calcaire oolithique de Trouville et le Coral-Rag. »

Léo : « Mais… C’est même pas toi qui l’as dit ! »

Max : « Je l’aurais dit si tu avais laissé le temps à bonome de nous interroger ! Mais tu lui as coupé la parole. Ça se fait pas tu sais Léo. Tu es pas poli. »

Léo : « Ben ça alors ! Quel toupet ! »

Le chevalier : « Max… »

Max : « Oui bonome ? »

Le chevalier : « Je ne sais pas quoi dire… Je suis déçu. »

Max : « Oh mais je rigolais. Pfff ! Si on peut même plus plaisanter… »

Le chevalier : « Tu plaisantais ? »

Max : « Mais oui ! Je suppose que je dois présenter mes excuses à notre bon Léo ? »

Le chevalier : « Cela s’impose. »

Max : « Mon Léo, je te prie de m’excuser. J’aurais pas dû. Ma plaisanterie était pas drôle. Tout ça tout ça… »

Léo : « Tout ça tout ça ? »

Max : « Désolé si je t’ai blessé. Pardon Léo. »

Léo : « Tu es pardonné 🙂 On reprend ? »

Le chevalier : « L’Oxfordien moyen carbonaté occupe la partie inférieure de la falaise. »

Samuel : « On voit pas bien. »

Le chevalier : « C’est vrai… Et nous ne l’étudierons pas beaucoup. Au-dessus il y a le Calcaire de Blangy. C’est une fine couche blanche d’une dizaine de centimètres d’épaisseur qu’on ne voit quasiment pas ici. Elle termine l’Oxfordien moyen et est couronnée par une surface d’érosion appelée Surface de Blangy. »

Max : « C’est la fin d’un cycle… »

Léo : « Et ensuite ? »

Le chevalier : « Il y a le calcaire gréseux d’Hennequeville surmonté par les Marnes de Villerville. »

Léo : « On revient à une sédimentation terrigène. »

Samuel : « On va étudier le calcaire gréseux d’Hennequeville et les Marnes de Villerville ? »

Le chevalier : « Je vais essayer de vous présenter les Calcaires gréseux d’Hennequeville. Les Marnes ne sont pas passionnantes. »

Max : « Bonome, tu as dit que tu connaissais pas… »

Léo : « Vous imaginez si il connaissait bien ? »

Samuel : « On y passerait des semaines… »

Max : « Bon, on avance ? »

Léo : « Calcaires gréseux d’Hennequeville nous voilà ! »

Le chevalier : « Ils sont là, devant nous… »

Samuel : « On peut s’approcher un peu ? Pour mieux étudier. »

Max : « Samuel, on s’approche pas des falaises ! Et tu as pas vu le gros rocher qui menace de tomber ! Tu veux te faire crabouiller ? »

Samuel : « Cousin Max, je suis pas totalement idiot tu sais. Je vais pas aller juste sous le gros rocher 🙂 »

Le chevalier : « Avançons encore un peu… Là, nous pouvons voir l’ensemble de la formation. »

Max : « On voit tout là ? »

Le chevalier : « Il manque la base de la formation… »

Max : « D’accord. Alors… »

Samuel : « Il y a alternance de couche très dures, qui dépassent un peu, et de couches plus tendres, un peu en retrait. »

Léo : « Si on parle de calcaires gréseux c’est qu’il y a du calcaire et des grains de quartz. Je suppose que les couches tendres sont plus riches en calcaire que les couches dures qui, elles, sont bien gréseuses. »

Max : « Il y aurait surtout des grains de quartz bien cimentés. »

Samuel : « Alors que dans les couches meubles il y a plus de calcaires et c’est pas bien cimenté. »

Léo : « Et au-dessus de tout ça il y a les Marnes de Villerville qui forment le talus végétalisé. »

Max : « On peut supposer qu’entre les deux il y a une surface de discontinuité marquant une émersion. »

Léo : « On a bon ? »

Le chevalier : « Vous m’impressionnez ! Vous progressez chaque jour. »

Max : « Eh oui ! »

Léo : « Et on travaille en équipe 🙂 »

Max : « Sans être soporifiques 🙂 »

Samuel : « Et vlan ! »

Le chevalier : « Vous avez oublié de parler de la couche X et de la couche Y. Et vlan ! »

Max : « C’est quoi ça ? »

Le chevalier : « Les deux couches dures les plus visibles. Les couches X et Y. Re vlan ! »

Max : « Hé ! Ho ! Vlan toi même d’abord ! »

Le chevalier : « 🙂 Mes petizours, je suis fier de vous 🙂 »

Samuel : « Tu peux nous expliquer un peu plus quand même ? »

Le chevalier : « Bien sûr mon petitours. Pour cela avançons un peu… »

Max : « Bonome, c’est quoi ça ? »

Le chevalier : « Quoi ? »

Max : « Ça là ! Avance un peu voyons ! »

Léo : « C’est un moteur ! »

Max : « Il y a des moteurs partout ! »

Samuel : « C’est peut-être celui de Tante Yvonne que vous retrouviez plus en Bretagne… »

Léo : « Ben non, c’est quand même pas possible qu’il ait fait tout le tour de la Bretagne pour arriver ici. »

Samuel : « Alors c’est encore un bateau inconnu. »

Max : « On pourrait demander au vent qu’il nous raconte son histoire. »

Léo : « Oui mais pas maintenant. On étudie l’Oxfordien supérieur là. »

Max : « Oui Léo. Bien Léo. »

Le chevalier : « Allons observer cette pointe… Là… »

Léo : « Elles sont étranges ces couches… »

Max : « J’irais même jusque bizarre… »

Léo : « Forcément, bonome, il repousse l’étrange aux limites du bizarre. »

Le chevalier : « Je m’inscris en faux ! Je ne suis pas responsable de la sédimentation de l’Oxfordien supérieur ! Je n’y peux rien si c’est tellement étrange que vous trouvez ça bizarre ! »

Max : « Tu as des preuves ? »

Le chevalier : « Des preuves ? Quelles preuves ? »

Max : « Des preuves que tu es pas responsable de la sédimentation de l’Oxfordien moyen. »

Le chevalier : « Parce qu’il me faut des preuves ? »

Max : « Ah, tu vois ! Tu peux pas le prouver… Il faut assumer bonome. »

Le chevalier : « Je n’y crois pas ! Alors selon vous c’est de ma faute si vous ne comprenez pas la sédimentologie d’ici. »

Max : « Ben oui. Il fallait pas faire compliqué comme ça. Maintenant il faut que tu nous expliques. Allez, au travail… »

Le chevalier : « J’aurai tout entendu. C’est trop fort… Moi, responsable de la sédimentation d’il y a 160 millions d’années… »

Max : « Ou alors tu prends ton Tardis et tu retournes dans le temps pour arranger ça. »

Le chevalier : « Bonne idée ! Avec un peu de chance ma ligne temporelle s’en trouverait modifiée et je ne vous rencontrerais jamais. »

Max : « Et qui prendrait soin de toi ? »

Le chevalier : « Parce que vous prenez soin de moi ? Je n’avais pas remarqué. »

Max : « Qui te mettait tes chaussettes quand tu étais tout cassé ? »

Le chevalier : « Pfff ! Je préfère vous expliquer les sédiments de l’Oxfordien supérieur… »

Max : « Ben, on attend nous ! Tu fais rien qu’à bavasser ! »

Le chevalier : « Ce n’est pas si étrange… Bien, en bas, il y a le membre inférieur des calcaires gréseux d’Hennequeville. Il est constitué d’argiles silteuses à lits de nodules de calcaires. »

Samuel : « Les nodules ce sont les espèces de boules blanches ? »

Le chevalier : « Oui petit Sam. »

Samuel : « On dirait qu’il y a plus de calcaires que d’argiles… »

Le chevalier : « C’est vrai 🙂 »

Léo : « Elle est où la limite avec le membre moyen ? »

Le chevalier : « Au centre de la foto, à partir de là où il y a des algues. »

Léo : « Je vois. A partir de là c’est le membre moyen alors. »

Le chevalier : « Épais de 1,5 à 2 mètres il est constitué de bancs de calcaires gréseux intercalés de silts argileux à silex. »

Max : « Comme les silex qu’on a vus en arrivant ? »

Le chevalier : « Oui. »

Max : « Alors les blocs éboulés étaient du membre moyen des calcaires gréseux. Maintenant on le sait. »

Samuel : « Chevalier, tu peux me rappeler ce que c’est, un silt ? »

Le chevalier : « Bien sûr mon petitours. Ce sont des produits de l’érosion fluviale des roches. Leur taille est comprise entre celle des argiles et celles de sables. En réalité il faudrait utiliser le terme français de limon. Les particules limoneuses sont constituées de quartz, de mica et de feldspath, voire de minéraux argileux. »

Samuel : « Merci chevalier. C’est gentil de répondre patiemment à mes questions. »

Le chevalier : « Tu sais bien que je suis à ton service Samuel. »

Samuel : « Un grand chevalier au service d’un petitours. Rhoooo ! »

Max : « Au service de trois petizours ! »

Samuel : « Rho quand même ! 🙂 »

Le chevalier : « Les bancs gréseux X et Y font partie de ce membre moyen. »

Léo : « Et le membre supérieur ? »

Le chevalier : « Il débute un peu au-dessus du banc Y. Il est constitué d’argiles silteuses très claires et renferme un banc gréseux. »

Max : « Si on résume, les calcaires gréseux sont constitués de calcaires et de grès. »

Léo : « Ben oui, forcément ! »

Samuel : « Et au-dessus encore il y a les Marnes de Villerville. »

Le chevalier : « Oui petit Sam. »

Max : « Tu veux bien nous montrer les silex s’il te plaît ? »

Le chevalier : « Oui… Mmmmm… là ! »

Max : « Pourquoi elle est comme ça la surface des silex ? »

Le chevalier : « Je ne sais pas Maxou. En revanche, je sais qu’on les appelle des silex cérébroïdes. »

Max : « Ça ressemble même pas à un cerveau ! »

Léo : « Ça se forme comment les silex ? »

Le chevalier : « Bonne question 🙂 Rappelons que le silex est constitué de calcédoine de formule chimique SiO2. »

Max : « Comme le quartz ! »

Le chevalier : « On dit que ce sont des polymorphes. Même composition chimique, mais cristallisations différentes. »

Max : « Mais ça nous dit pas comment ça se forme… »

Le chevalier : « Ici il y a deux hypothèses. La première repose sur la présence dans l’eau de mer, à l’époque de la sédimentation, d’organismes à exosquelettes siliceux, tels que les éponges ou les diatomées. Lors de leur décomposition, ces organismes enrichissent l’eau en silice peu soluble qui précipite et donne les silex. »

Max : « Bien. Seconde hypothèse ? »

Le chevalier : « L’apport de silice se fait par une augmentation de l’activité volcanique pas trop loin. »

Léo : « Tu as pas dit que vers cette époque, l’océan Atlantique commençait à s’ouvrir ? Ça fait beaucoup du volcanisme sous-marin ça ! »

Max : « C’est quelle hypothèse alors ? »

Le chevalier : « Je n’en sais rien. Probablement les deux simultanément… »

Samuel : « On sait le silex maintenant. »

Léo : « Bonome, j’ai vu quelque chose d’étrange. On peut aller voir ? »

Le chevalier : « Montre nous mon petit Léo. »

Léo : « Là… Et là aussi !… Et encore là ! »

 

Max : « Tout ça !!! »

Samuel : « Cousin Léo observe vraiment bien. Oulala ! Il voit tout lui ! »

Max : « Tu vas savoir expliquer tout ça bonome ? »

Le chevalier : « Mmmmm… »

Max : « Il se gratte la tête 🙂 »

Léo : « En mmmmmmant… »

Samuel : « Il fait sa tête de quand il réfléchit intensément. »

Max : « J’espère qu’il va pas aller dans sa tête. Alors bonome ? Léo t’aurait-il coincé ? »

Le chevalier : « Un peu… Les noms de ces structures m’échappent. Sauf l’avant dernière. C’est une déformation en blague à tabac. »

Max : « Tiens, c’est surprenant que tu te souviennes de ça. Blague à tabac… »

Léo : « Elles viennent d’où ces déformations ? »

Le chevalier : « Ce sont des déformations syn-sédimentaires. »

Max : « Aïe ! »

Samuel : « Ouille ! »

Léo : « Bonome, si tu veux éviter des cris dépêche toi d’expliquer. »

Le chevalier : « Avec des mots simples je suppose 🙂 Alors il vaut mieux que j’évite de parler des propriétés thixotrophiques des sédiments… »

Max : « Oui bonome, évite, c’est mieux. »

Le chevalier : « D’abord il faut préciser que ces déformations ne touchent que le membre moyen des calcaires gréseux. Le sédiment est composé de sables fins à 5-15 % de quartz, de spicules d’éponges et il est plus ou moins riche en boue carbonatée. »

Léo : « On savait déjà. »

Le chevalier : « Et il est gorgé d’eau. »

Max : « On s’en doute puisque c’est un sédiment marin. »

Le chevalier : « Alors vous savez que ce genre de sédiment gorgé d’eau peut se liquéfier quand il est soumis à un ébranlement mécanique. »

Max : « Ah ben non. On savait pas. »

Léo : « Un ébranlement mécanique ? Comme un séisme ? »

Le chevalier : « Absolument Léo. »

Léo : « Il y a des séismes quand un océan s’ouvre. »

Le chevalier : « Oui Léo. »

Léo : « Alors, il y a des séismes, des épanchements de lave qui enrichissent l’eau en silice… On peut vraiment supposer que c’est l’ouverture de l’océan Atlantique qui est à l’origine de ce qu’on voit dans le membre moyen des calcaires gréseux. »

Le chevalier : « On peut supposer, en effet. »

Max : « Il est fort ce Léo. »

Samuel : « Je suis fier de mon cousin. »

Léo : « Arrêtez, vous me gênez… »

Samuel : « Cousin Léo est discret et modeste. Pas comme cousin Max 🙂 »

Max : « Hé ! Ho ! Je suis très discret moi ! Et modeste ! Oulala ! Mais j’y peux rien si la nature m’a doté de tant de qualités 🙂 »

Samuel : « Oui cousin Max 🙂 »

Le chevalier : « Nous avons déjà bien travaillé aujourd’hui… »

Léo : « On a pas vu les Marnes de Villerville ! »

Le chevalier : « Nous pourrons observer leur base dans quelques mètres. »

Max : « Alors on y va bonome, on y va ! Allez ! »

Le chevalier : « Oui Maxou… Voilà ! »

Léo : « On voit un dernier banc gréseux au sommet des calcaires gréseux. Et par dessus les Marnes de Villerville… »

Samuel : « Mais elles sont tout glissées. On les voit pas en place vraiment… »

Max : « Bonome, tu veux bien me fotoer sur la surface des calcaires gréseux s’il te plaît. Pour montrer à Princesse. »

Le chevalier : « Oui Maxou. Installe toi… »

Samuel : « Cousin Max se fait toujours fotoer pour montrer à Princesse. C’est rigolo 🙂 »

Le chevalier : « Oui… Si nous faisions une pause ? »

Max : « Quelle genre de pause ? Avec câlin et gratouillis ? »

Léo : « Ou avec zoisos ? »

Le chevalier : « Je vous laisse le choix. »

Max : « Par souci de compromis je proposerais de commencer par câlin et gratouillis et de poursuivre par un peu de zoisologie. Ainsi tous les petizours seront pleinement satisfaits. Que pensez-vous de ma proposition ? »

Léo : « Votée ! »

Samuel : « Votée aussi ! »

Max : « Et on écoute le vent nous raconter l’histoire du moteur. »

Le chevalier : « Seulement s’il est d’accord. »

Max : « Ben oui ! On lui demande gentiment. Dis le vent, tu nous racontes l’histoire s’il te plaît ? »

Le vent a bien voulu. Il nous a tout raconté les déboires du bateau dont on a vu le moteur. Mais on peut pas te dire Princesse, sauf que les marins vont bien. Ils se sont pas noyés. Après, le vent nous a raconté une autre belle histoire des temps passés. Il soufflait juste ce qu’il faut pour que ça nous caresse le visage. C’est très agréable les caresses du vent. Nous on aime beaucoup. Et puis il a fait une bourrasque pour qu’on poume ! C’était le signal de la fin de la première pause. On s’est pochés et bonome est allé dire bonjour aux zoisos de la mer…

On a d’abord vu un goléand argenté. Je détaille un peu les Laridés parce que lors du Grand Jeu Concours les participants ont dit des erreurs sur les Laridés. Léo est atterré. Depuis il prépare un artcile spécial Laridés pour réviser parce que là ça va pas du tout ça ! Il y travaille déjà mais on attend que je finisse la Normandie avant de le publier.

Alors le goéland argenté (Larus argentatus, Laridés)…

Il fait partie des goélands à ailes gris-clair. Comme le leucophée. Mais lui a les pattes rose. Rose clair, presque gris… Mais pas jaune. Ailes gris-clair et pattes roses c’est l’argenté ! C’est pas dur quand même ! Pfff !

Ensuite, on a vu des goélands cendrés (Larus canus, Laridés).

C’est la première fois qu’on en voit autant d’un coup. Le cendré a aussi les ailes gris-clair. Mais il a l’œil sombre. Ça se voit bien. Et ses pattes sont jaune-verdâtre. Le bec est relativement fin et rectiligne. Et puis, il est pas pareil. Ça se voit quand même qu’il est pas pareil ! Il est plus trapu. Son cou surtout. En plumage d’hiver il a du gris un peu sur la tête. Mais pas beaucoup. C’est un goéland cendré… Bonome et Léo les reconnaissent très bien les cendrés. De très loin ! Même que Sam et moi on les a même pas encore vus !

Puis il y a eu des huîtriers-pies (Haematopus ostalegus, Haematopodidés).

J’espère que tu les reconnais ceux-là ! ‘Pie’ ça veut dire noir et blanc. Et avec leur long bec rouge… Ce sont des beaux zoisos 🙂

Revenons aux Laridés… On a vu lui 🙂

Ailes gris-clair, pattes roses… Normalement c’est un argenté. Mais si tu suis bien Princesse, tu dois être perturbée par le gris foncé sur le bout des ailes. C’est parce qu’il est pas fini ce goéland. Mais il est quand même pas difficile à identifier. C’est juste qu’il est dans son 3ème hiver. L’été prochain il aura toutes les bonnes couleurs.

Puis il y a eu le chevalier gambette (Tringa totanus, Scolopacidés).

On l’a suivi un peu, en nous approchant. Mais sans lui faire peur alors il nous a laissés faire. On était à quelques mètres de lui. Sur la foto il nous observe. C’est parce que les zoisos de Normandie connaissent pas encore le grand chevalier aux petizours… Puis il a été rejoint par un goéland cendré, et une mouette qui rigole…

Trois zoisos de mer côte à côte qui cherchent du manger… Bon en vrai on a zoisoté plus longtemps que ça. Mais on a pas vu plus d’espèces. C’était bien quand même. Surtout qu’on était pas là pour les zoisos mais pour la géologie…

Léo : « Merci bonome pour ces beaux zoisos. »

Max : « On reprend la géologie maintenant ? »

Le chevalier : « Que voulez-vous voir ? »

Samuel : « Moi, je connais pas bien encore. Mais je sais qu’avec toi, chevalier, on peut toujours voir des détails qu’on avait pas vus avant. »

Léo : « Petit Sam a raison. Il faut retourner à notre monture. A l’aller, tu nous a montré les formations bien visibles en falaise. Mais je suis sûr que tu peux nous montrer des tas d’autres choses. »

Max : « Allez bonome ! Au travail ! »

Le chevalier : « Vous êtes quand même un peu exigeants tous les trois. »

Max : « Mais noooon ! On a confiance en toi ! On va où pour les détails ? Au pied de la falaise ? »

Le chevalier : « Allons-y… »

Samuel : « C’est pas prudent d’aller au pied de la falaise… »

Max : « Ici elle est basse la falaise. Et c’est des coulées de marnes. »

Léo : « Je sais pas si c’est mieux de se faire ensevelir sous les marnes que de se faire crabouiller par des rochers… »

Le chevalier : « Les risques sont faibles. Allons voir… »

Max : « C’est quoi ça ? »

Le chevalier : « Mmmmm… Il me semble que c’est la glauconie de base du Cénomanien. »

Léo : « Le Cénomanien du Crétacé ? Mais normalement il est tout en haut de la falaise ! »

Samuel : « La falaise a glissé pour nous montrer les formations qui sont à son sommet ! »

Le chevalier : « La falaise a glissé, certes, mais je doute que ce soit dans le but de nous montrer ses formations. »

Max : « Bonome, sur la seconde foto on dirait que la glauconie est bien en place sur les marnes. »

Le chevalier : « Il me semble bien. »

Max : « Bien, il ne te reste donc plus qu’à nous expliquer la glauconie. »

Le chevalier : « C’est une interro ? C’est noté ? Pfff ! C’est toujours moi qui ai interro et j’ai même pas révisé. C’est pas juste. Je vais avoir faux et tu vas plus m’aimer… »

Samuel : « 😀 Bonome imite cousin Max ! »

Léo : « On s’y croirait ! »

Max : « Samuel l’a appelé bonome ! »

Samuel : « Oups ! Pardon chevalier. »

Le chevalier : « Tu peux m’appeler bonome mon petit Sam. Sens toi libre. »

Samuel : « Merci chevalier, mais je m’en voudrais de dire bonome à un si grand et si gentil chevalier. »

Le chevalier : « Comme tu veux mon petitours. »

Max : « Oui oui, c’est très bien tout ça mais la glauconie bonome, la glauconie ! »

Le chevalier : « C’est un calcaire riche en une association de minéraux argileux (micas, smectites…) de couleur verdâtre. D’ailleurs glauconie viens de glaukos qui veut dire verdâtre en grec ancien. »

Max : « Le grékancien… Ça faisait longtemps que tu en avais pas parlé ! T’ai-je déjà dit ce que je pense du grékancien ? »

Léo : « On s’en fiche ! Nous on aime bien le grékancien ! Continue bonome. »

Le chevalier : « Merci mon Léo. La glauconie résulte de l’altération de la biotite, un autre minéral argileux présent dans les marnes. »

Léo : « La glauconie vient donc de l’altération des marnes d’en dessous… Mmmmm… C’est possible que si la sédimentation argileuse s’est arrêtée… Et tu as parlé de calcaire glauconieux. Donc il y a eu arrêt de la sédimentation argileuse, altération et sédimentation calcaire. »

Samuel : « Cousin Léo est un grand géologue. »

Max : « Oui, mais bon, les argiles de Villerville datent de l’Oxfordien supérieur et la glauconie du Cénomanien. Il y a forcément eu arrêt de la sédimentation entre les deux. Tout le monde sait ça ! »

Samuel : « Oui, mais cousin Léo explique ce qu’il s’est passé. Et c’est clair. »

Max : « C’est sûr que c’est plus facile à comprendre qu’avec le grand chevalier ! »

Le chevalier : « Je néglige. »

Max : « C’est pas dans ce niveau qu’il y a les drôles d’éponges dont je me souviens plus le nom ? »

Le chevalier : « Demande à Léo. Il te dira simplement lui. »

Samuel : « Et vlan ! »

Léo : « Si, c’est bien dans ce niveau. Mais je me souviens plus du nom de ce éponges… »

Samuel : « Les éponges comme celles-ci ? »

Le chevalier : « Exact ! Belle découverte petit Sam. C’est le genre Plocoscyphia »

Max : « Tu vois que tu nous trouves des détails 🙂 »

Léo : « Et ça ? C’est quoi ? On dirait un gros tas d’huîtres… »

Le chevalier : « Une lumachelle à huîtres. Si je ne dis pas d’erreur, elle date du Kimmeridgien inférieur. »

Max : « Le Kimmeridgien ? Tu es sûr ? Parce que tout à l’heure j’ai dit que la glauconie de base du Cénomanien reposait sur les Marnes de Villerville de l’Oxfordien, ce qui sous-entendait l’absence du Kimmeridgien. »

Le chevalier : « Et je t’ai laissé dire ? »

Max : « Ben oui ! »

Le chevalier : « Oups ! Pardon désolé ! J’aurais pas dû. »

Max : « Ben voilà ! Et maintenant mes lecteurs vont dire que je fais des erreurs. Et toi tu laisses faire ! Qu’est ce qu’on peut faire avec un bonome comme celui-là je vous le demande ! »

Léo : « Max, de toutes façons le Kimmeridgien est aussi formé de marnes alors tu as pas vraiment dit des erreurs. »

Samuel : « Chevalier, tu connais l’espèce de ces huîtres ? »

Le chevalier : « Deltoidium delta (ex. Liostrea delta = ostrea subdeltoida), Gryphaéidés. »

Samuel : « Merci chevalier. »

Léo : « On continue ? »

Le chevalier : « Oui, il faut bien retourner à notre monture. »

Max : « On pourrait se promener, les mains dans les poches, en sifflotant. »

Léo : « Quand bonome sera fatigué. Pour le moment, on inspecte encore… Là ! Un zoursin ! »

Samuel : « Là aussi ! »

Léo : « Tu les connais ? C’est qui ces zoursins ? »

Le chevalier : « Aloraloralor… La gangue est nettement calcaire : nous sommes probablement au Cénomanien moyen… Ce pourrait être… Voyons ça… Mmmmmm… »

Max : « Ben voilà ! Il est encore parti dans sa tête étudier ses livres de zoursins. Un jour il va plus en revenir de sa tête ! »

Le chevalier : « Je dirais bien Epiaster crassissimus, Taxoastéridés. »

Max : « C’est pas nous qui allons te contredire… »

Léo : « Il peut pas être de l’Oxfordien moyen carbonaté ? Pourquoi tu penses au Cénomanien ? »

Le chevalier : « Parce que ici l’Oxfordien moyen n’affleure pas, Léo. Il doit être à une dizaine de mètres sous le sable. »

Léo : « Ah ben oui. Je suis bête moi. »

Le chevalier : « Non Léo. Tu es un peu fatigué. La journée a été longue déjà. »

Samuel : « Moi aussi je suis tout fatigué. »

Max : « Alors si petit Sam est fatigué on se poche et on retourne à la monture ! Allez les cousins. Grimpez ! »

Le chevalier : « Et si vous ne dormez pas en arrivant à l’escalier, je vous laisserai fossiler un peu. »

Max : « D’accord. Merci bonome. On est installés. Tu peux cavaler maintenant. »

Un peu plus tard…

Le chevalier : « Mes petizours… »

Max : « On dort pas ! »

Léo : « On attendait patiemment. »

Samuel : « On veut fossiler ! »

Le chevalier : « Alors descendez et amusez vous bien ! »

Max : « Bonome ! Viens voir ! Les cousins ! Venez aussi ! »

Léo : « On arrive ! »

Samuel : « On est là ! »

Le chevalier : « Belle trouvaille Maxou ! »

Max : « C’est quoi ? Une lumachelle à trigonies ? »

Le chevalier : « Exact Maxou. »

Samuel : « Bravo cousin Max ! Bravo ! »

Max : « Tu expliques bonome s’il te plaît. »

Le chevalier : « C’est un dépôt de tempête. La forte houle a rassemblé les coquilles mortes ou vivantes en haut de l’estran. Vous avez reconnu le calcaire gréseux d’Hennequeville je suppose. »

Max : « Ben oui, quand même ! Voyons bonome ! »

Léo : « Tu connais l’espèce ? »

Le chevalier : « Je pense que ce sont des Myophorella clavellata (ex. Trigonia Bronni), Trigoniidés. »

Samuel : « Tu en connais des choses, rholala ! »

Max : « Et encore, il est jamais venu ici. »

Léo : « Tu étais vraiment jamais venu ? »

Le chevalier : « Non, je n’avais jamais pris le temps. »

Léo : « C’est pour nous que tu es venu alors ? »

Le chevalier : « Oui 🙂 »

Léo : « Merci bonomou. »

Après on a trouvé des Gastéropodes. Je les montre vite fait parce que je les aime bien mais ils sont pas très intéressants.

Puis on a déniché des trigonies. J’ai pas voulu embêter bonome en lui demandant les espèces. Disons que ce sont des trigonies et puis c’est tout.

Et puis après…

Max : « BONOME ! BONOME ! VIENS VOIR ! VITE ! »

Le chevalier : « Tu as trouvé quelque chose Maxou ? »

Max : « OUI ! DÉPÊCHE TOI ! »

Samuel : « Qu’est ce que tu as trouvé ? »

Léo : « Fais voir ! »

Max : « Bonome, c’est un morceau d’os ? C’est de l’os de dinosaure ? On a trouvé un dinosaure ? »

Léo : « C’est vrai ? C’est un dinosaure ? »

Samuel : « Rholala ! Cousin Max, tu vas avoir ton nom dans les livres ! »

Léo : « Tu vas l’appeler comment ton dinosaure Maxou ? »

Max : « Mmmmm… Le Samueleosaurus maxus… »

Léo : « Rhoooo ! Un os de dinosaure ! »

Le chevalier : « Mes petizours, je ne veux pas briser votre enthousiasme mais je n’oserais pas affirmer que c’est bien un os de dinosaure… »

Max : « C’est pas un Samueleosaurus ? »

Le chevalier : « Tout ce que je peux dire c’est que c’est bien un fragment d’os. Désolé. »

Max : « Oui, ce serait trop beau… »

Léo : « Tu pourras quand même le mettre dans ta collection Maxou. »

Max : « On dira que c’est probablement un os de Samueleosaurus maxus mais qu’on est pas sûrs. »

Samuel : « Tu as un très beau fossile cousin Max. »

Léo : « Bonome, je pense qu’on trouvera plus rien maintenant. »

Le chevalier : « On rentre ? »

Léo : « On peut faire une pause pour regarder la mer monter ? »

Le chevalier : « Bien sûr. Je vous porte sur le rocher… »

Samuel : « Cousin Max, pourquoi tu te mets à l’écart ? Viens avec nous ! »

Après on est rentrés. Bonome a dû tout remonter le grand escalier puis continuer à monter pour rejoindre notre monture. On a chevauché en silence parce qu’on était tout fatigués.

Le soir…

Max : « Qu’est ce qu’on fait ce soir ? »

Le chevalier : « Et si nous ne faisions rien ? »

Max : « Rien du tout ? »

Le chevalier : « Rien du tout ! »

Léo : « Mais on a déjà fait rien ce matin ! »

Le chevalier : « Oui, mais on avait pas fini. »

Max : « D’accord 🙂 »

Voilà Princesse c’était encore une belle journée en Normandie. Je t’embrasse et j’espère que tu vas bien. Même si tu donnes toujours pas de nouvelles…

Continuer la promenade

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *